Dans une boîte d'une taille équivalente à celle d'une cassette vidéo (187 x 25 x 104), pour un poids d'environ 300 grammes, Yamaha est parvenu à caser un séquenceur, un arrangeur, ainsi qu'un générateur de son. Bel exemple d'intégration à grande échelle !
Alimenté par piles (6 x 1.5 volts, pour une autonomie de quinze heures) ou par batterie (9/12 volts - 300 mA), le QY1 0 communique avec l'extérieur grâce à une sortie ligne, à une sortie casque (toutes deux au format mini jack stéréo, avec potentiomètre de volume commun), et à deux prises MIDI (In, Out).
En dessous d'un écran LCD 16 caractères sont disposés 46 switches en caoutchouc, répartis en trois catégories : touches de fonction, commandes de transport (lecture, enregistrement, pause, retour à zéro, avance et retour rapide), et mini clavier monophonique d'une octave non sensible à la vélocité (transposable par pas de 12 demi-tons de manière à couvrir toute la tessiture MIDI).
Au format PCM, dont certains multiéchantillonnés, les sons du QY10 sont au nombre de trente (plus un drum kit réunissant 26 éléments de batterie et percussions), pour une polyphonie totale de 28 voies avec allocation dynamique !
De légères imperfections se sont révélées à l'écoute, notamment en ce qui concerne les boucles (HiStrEns, LoStrEns), les brusques variations de hauteur et de timbre qu'elles induisent lorsqu'elles sont très courtes et collées aux transitoires (vibes, SlapBass), de même que de légers bruits numériques résiduels (BrassEns, Synlead2).
Rassurez-vous, au milieu d'une séquence, ces quelques défauts se noient dans la masse. Du reste, Yamaha le prouve, avec trois programmes de démonstration magistraux.
Séquenceur...
Au niveau séquenceur, d'une polyphonie maximum de 32 notes à répartir entre huit pistes, huit songs résident en mémoire (pour au plus 300 mesures par song). Chaque piste possède une fonction mute, un réglage de volume, de plage de pitch-bend, et de panoramique à trois positions (gauche, centre, droite). Cependant, les pistes 5 et 8 jouent un rôle bien spécifique, puisqu'elles appartiennent aux patterns (d'une longueur comprise entre 1 et 8 mesures).
Par conséquent, il est impossible de les enregistrer en mode song. La première étape va donc consister à enchaîner ces patterns pour former un song, en les positionnant sur des frontières de mesure, sachant que chaque pattern dure jusqu'au début du suivant.
Par exemple, pour ne faire jouer que les deux premières mesures d'un pattern de huit mesures placé en début de song, il suffit qu'un second pattern démarre à partir de la troisième mesure de ce song.
... ou arrangeur ?
Ces fameuses quatre pistes dont les patterns sont composés se nomment accord 1, accord 2, basse et batterie. Parmi les 100 patterns du QY10, 24 sont programmables par l'utilisateur, tandis que les 76 autres (caractérisées par un tempo, un type de mesure et un son bien précis pour chacune des trois premières pistes) correspondent à des arrangements figés en ROM dans des styles divers et variés (funk, rock, jazz, laidback west coast, balearic beat, carribean electronic, etc).
Mais à ce stade des manipulations, notre song (dont nous aurons fixé le tempo, de 30 a 250, et la mesure : 1/4...8/4, 1/8...8/8, 1/16...8/16), se borne à reproduire en Do majeur l'ensemble des patterns précédemment enchaînés. Pour mettre un terme à cette affligeante platitude tonale, il convient de programmer la grille harmonique. Avec autant de précision que le permet la résolution (24 à la noire), nous positionnerons les accords, créés à partir d'une fondamentale et de l'un des vingt types proposés par le QY10 (M, add9, m, m add9, 7, 9, m7, m9, 7M, 9M, 6, 6-9, sus4, 7-sus4, dim, m7-5, aug, 7+5, 11 , 13).
Les patterns suivront alors docilement la grille, fonctionnant à la manière d'un arrangeur. En effet, les notes des trois premières pistes (et c'est là que réside leur particularité) se modifieront automatiquement en temps réel pour « coller » à l'harmonie (coïncider avec les accords). Il en va de même pour les 24 premiers patterns, enregistrés par l'utilisateur !
Fin du fin , dans un song, rien n'interdit de mélanger des pistes en provenance de différents patterns (basse salsa, batterie house, accords gospel...), d'intervenir sur leurs vélocités (offset), ou de modifier la ligne de basse.
L'enregistrement
Approximativement égale à 6 000 notes, la capacité du séquenceur n'est entamée que par les pistes 1 à 4 et les 24 premiers patterns. La place restante s'affiche à l'écran en pourcentage. Un song uniquement basé sur des patterns préprogrammés ne consomme quasiment pas de mémoire.
Il existe trois moyens d'enregistrer les pistes 1 à 4 (dont il reste à définir les sons, modifiables en cours de morceau par l'intermédiaire de program change) : le pas à pas pur et dur (chaque note est définie par une position, une valeur rythmique, une durée en pourcentage de celle de sa valeur rythmique, une hauteur, saisie au mini clavier, et une vélocité), le pas à pas mixte (hauteur et vélocité proviennent d'un clavier MIDI), et le temps réel (par l'intermédiaire d'un clavier MIDI ou du mini clavier, à partir du numéro de mesure spécifié, et jusqu'à l'appui sur la touche stop).
Les modes pas à pas permettent de rentrer des accords, alors qu'en temps réel, avec le mini clavier monophonique, plusieurs « prises » successives en mode overdub s'avéreront nécessaires.
Au niveau des messages MIDI de voix, en dehors des notes et des program changes, le QY10 n'implémente (et donc n'enregistre) que le pitch-bend et le sustain (pas de modulation, pas d'aftertouch... ). En mode Auto Chord Record, chaque touche blanche du mini clavier sert à enregistrer en temps réel un renversement particulier des accords de la grille sur l'une des quatre premières pistes. Enfin, la fonction de transposition (± 12) affecte. l'intégralité du song, sauf bien entendu la piste de batterie.
L'édition permet d'altérer, de supprimer ou d'insérer n'importe quel événement individuel (les messages MIDI, y compris les program changes sur les pistes accord 1, accord 2 et basse, mais aussi les informations d'accompagnement : accords, numéros de patterns, offset de vélocité et modification de la ligne de basse).
Les opérations entre pistes sont les suivantes : mixage de deux pistes, quantification, transposition et effacement d'un bloc de mesures d'une piste, suppression d'un bloc de mesures sur l'ensemble des pistes, copie d'un bloc de mesures un certain nombre de fois d'une piste à l'autre, effacement de pistes, insertion de vide ou d'un bloc de mesures sur l'ensemble des pistes.
Pour plus de facilité, les manipulations affectant une piste individuellement pourront s'appliquer simultanément aux pistes 5 à 8 (celles des patterns), regroupées sous le nom de « backing tracks ».
Le mode Combine provoque des résultats surprenants, en créant une piste à partir des positions d'une première piste, des notes d'une seconde, et des vélocités d'une troisième ! Grossièrement, l'enregistrement et l'édition des 24 premiers patterns s'apparentent aux procédures décrites ci-dessus pour les pistes 1 à 4 d'un song.
Toujours pour les patterns, en plus des fonctions de quantification, de copie, de transposition et d'effacement de pistes, l'échange d'un bloc de mesure entre une piste pattern et une piste song est autorisé. La copie d'un pattern (ou d'une piste d'un pattern) d'un emplacement ROM vers un emplacement RAM permettra de modifier ou d'enrichir une présélection.
Dans les normes
Côté MIDI, chaque piste est associé d'un numéro de canal non modifiable (canaux 1 à 8), ce qui autorise le pilotage d'unités externes (d'où l'intérêt d'une polyphonie du séquenceur supérieure à celle du générateur de son), ou l'inverse, l'utilisation du QY10 en tant que lecteur d'échantillons multitimbral.
Toutefois, pour contrôler Un expandeur à partir de l'une des pistes du séquenceur sans entendre pour autant le générateur de son interne, il faudra régler le volume de cette piste à zéro, ou n'y affecter aucun son.
La synchronisation (maître ou esclave) utilise les messages d'horloge, start, stop et continue, sans SPP aucun. Les messages exclusifs servent à transférer individuellement ou dans leur ensemble le contenu des sangs (soit au format QY10, soit au format N-SEQ, excluant les pistes 5 à 8, compatible avec d'autres modèles de la marque).
Avec le QY10, Yamaha inaugure l'ère du home studio de poche. Un outil performant à emmener partout avec soi, qu'il s'agisse de composer des séquences, ou de s'accompagner pour travailler un instrument (les guitaristes, bassistes... apprécieront). Le tout pour un prix de 300 € TTC, généralement constaté au 1/6/91.
Test réalisé par Christian Braut en juin 1991 (Keyboards Magazine n°45)