Face à la recrudescence des machines numériques, certains esprits n’hésitent pas à condamner l’analogique. Avec des enregistreurs de la trempe du G-24S, c’est aller un peu vite en besogne. Vingt quatre pistes sur bande 1 pouce, Dolby S intégré et carte de synchro en option : ça ne plaisante pas !
Le G-24S s'est offert un voyage d'affaire d'une quinzaine de jour à Paris, AVP oblige. Avant que cet unique modèle présenté en France ne reprenne l'avion pour une destination inconnue, nous en avons profité pour l'examiner sur son stand, et pour interroger Michel Pipereau, responsable du département audio professionnel CODIM France, afin qu'il nous livre en exclusivité le résultat de quelques tests rondement menés...
G16 + 8 + S + 1/2 pouce = G-24S
Prenez un G16 tout ce qu'il y a de plus ordinaire (le célèbre successeur du E16), rajoutez-lui 8 pistes, un réducteur de bruit de type Dolby S (en lieu et place du C), et pendant que vous y-êtes, 1/2 pouce de largeur de bande supplémentaire (50 % de plus par piste). Vous voici à la tête du G-24S, dont la logique du système d'exploitation est strictement identique à celle de son petit frère.
Le panneau avant s'incline selon deux angles différents (30 et 45 degrés), mais surtout, se détache pour se connecter à la prise remote par l'intermédiaire d'un câble de liaison (avec commutation front/rear par interrupteur). Une série de mini switches duplique quatre des fonctions de transport sur le panneau avant du magnétophone (play, stop, rewind, forward), histoire de ne pas dépendre systématiquement de la télécommande.
Les réglages du G-24S se situent juste derrière cette télécommande : plus besoin d'être à la fois technicien de maintenance et contorsionniste. Dans le même esprit, le cache tête amovible facilitera l'entretien. L'ergonomie du G-24S est donc loin d'avoir été négligée, pour un prix lui aussi très accessible (14 800 € TTC, généralement constaté au 1/1/90).
Le silence est d'or
Que ce soit sur un plan mécanique (grâce à un système d'entrainement par cames), ou sur la bande, Fostex lutte efficacement contre le bruit. Conçu au départ pour les platines cassettes, le Dolby S est une version simplifiée, et par conséquent moins coûteuse, du Dolby SR (introduit sur le marché en 1986). Le signal est compressé à l'enregistrement, expansé à la lecture, avec un subtil traitement sur des bandes de fréquences fixes et glissantes. En pratique, il apporte une réduction de bruit de 24 dB dans les hautes fréquences, et de 10 dB dans les basses fréquences.
Un pavé à point
Loin de se satisfaire des simples fonctions de transport de bande et d'enregistrement, le G-24S intègre des fonctionnalités très avancées, disponibles par l’intermédiaire d'un pavé numérique. L'afficheur du bas permet de visualiser tout un tas d’informations sur ces opérations (ainsi que sur celles du synchroniseur), l'afficheur du haut se comportant comme un simple compteur. Tous deux sont composés de sept segments à LED.
Les habitués de la marque ne seront pas surpris de trouver dix locators (programmables numériquement, à la volée, et éditables), mais aussi des fonctions telles que le rappel du dernier point de lecture, l'affichage du temps de bande restant, le réglage de vitesse de défilement rapide, du temps de préroll, de la zone limite de jeu, le nombre de sous-divisions d'une seconde en affichage (frames), ou le temps cumulé d'utilisation (bien pratique en cas d'achat de matériel d'occasion). En renseignant le G-24S sur le diamètre de chaque bobine et sur l'épaisseur de la bande, il ralentira et s'arrêtera avant qu'elle ne soit « éjectée ».
Sur la piste du monitor
Par rapport aux fonctions usuelles d'un enregistreur professionnel, rien n'a été oublié : auto locate, auto play, auto return (boucle continue en conjonction avec l'auto play), spot erase, rehearsal (mode d'entrainement en mode punch), et editing, facilité par une molette de recherche d'une précision exemplaire. En ce qui concerne les VU-mètres, quatre modes d'affichage sont disponibles : normal, permanent (mémorisation des crêtes), temporaire (tenue des crêtes pendant une seconde), et calibration (zoom sur 7 dB, de -5 dB à +2 dB). La sélection des pistes à enregistrer s'opère en appuyant sur les switches safe/ready correspondants, ou par l'intermédiaire du pave numérique.
Le monitoring est affectable à l'ensemble des pistes, ou uniquement aux pistes « ready » (par simple pression sur la touche record). Un mode spécial permet d'inhiber le monitoring en mode de lecture. Pour effectuer des drops manuels sur un groupe de pistes « ready», on maintiendra la touche play appuyée, en pressant alternativement les touches record (punch-IN), et stop (punch-OUT).
En avoir plein le dos
La face arrière du G-24S comporte 25 entrées et sorties cinch. Ces 25 prises de vues d'ailleurs correspondent au dédoublement des entrée et sortie de la piste 24. Le Dolby S est bien évidemment déconnectable sur la piste 24. Lorsque rien n'est accordé aux prises d'entrée 1 à 12 (détection par cinch à coupure), les prises 13 à 24 reçoivent les mêmes signaux, d'où une économie de 12 départs de console.
Les habitués de la pédale disposent des fonctions punch-IN/punch-OUT, et play/locate. Mais là où le G-24S commence vraiment à faire le gros dos, c'est en conjonction avec le synchroniseur 8330.
La carte 8330
Commun aux modèles G16 et G-24S, le 8330 est une carte enfichable qui joue le rôle d'un MTC-1 , d'un synchroniseur, et d'un générateur de code. Le tout pour 880 € TTC, prix auquel toute concurrence a disparu ! Il possède deux prises d'entrée et deux prises de sortie, réservées au time code.
La première prise d'entrée récupère le code en provenance de la sortie « dédoublée » de la piste 24, et la seconde lit celui du maître. En génération de code (dont le niveau est réglable), l'une des prises de sortie se connecte à l'entrée dédoublée de la piste 24, et l'autre à une unité externe. De ce fait, le 8330 écrira la même référence horaire sur deux machines tournantes (évitant ainsi de calculer un offset).
On constate que le dédoublement des prises d'entrée et de sortie de la piste 24 permet d'alterner entre une utilisation avec ou sans synchro, sans être contraint de « repatcher » la machine. Une astuce de câblage fort à propos. Le 8330 permet également d'automatiser certaines opérations du G-24S en fonction d'une heure SMPTE.
L'asservissement
La partie synchro est chargée d'asservir physiquement le G-24S à un autre appareil. Pour ce faire, elle compare le code couché sur la piste 24 du Fostex à un code externe : celui de l'unité maître. Afin de maintenir l'égalité entre ces deux horaires (avec une éventuelle programmation d'offset), la variation de vitesse des moteurs du G-24S est contrôlée en temps réel. En admettant qu'à un instant T, le 8330 lise 1.2.30.14 sur la bande du G-24S, et 1.2.30.16 sur l'unité maître, il en déduira un retard de deux images, et accélérera son moteur jusqu'à rattraper cette différence.
En dehors de la synchronisation en lecture par comparaison des codes, l'asservissement pourra prendre en compte le suivi des commandes de transport. Si l'unité maître est capable de renseigner le 8330 sur son activité courante (avance rapide, retour rapide... ), le G-24S commutera dans le mode correspondant. Le problème, c'est qu'en vitesse rapide, et donc en l'absence de code, il va falloir se repérer aux impulsions de tachymétrie (sorte de compte tour), envoyées par le maître.
LES PERFORMANCES DU G-24S |
L'accueil du G-24S à I'AVP s'est révélé plus que satisfaisant, aussi bien sur le plan de l'écoute, de l'ergonomie, de l'encombrement, et bien entendu du prix. Malheureusement, inutile d'espérer faire des tests sérieux dans les allées, pourtant bien moins bruyantes que sur d'autres manifestations... Michel, quel genre de tests techniques as-tu fait subir au G-24S ? Avec tant de monde sur 1 pouce, qu'en est-il de la diaphonie ? D'après toi, à qui s'adresse le G-24S ? |
L'apprentissage
L'apprentissage est une notion utilisée par un synchroniseur pour comprendre le rapport entre la tachymétrie et le time code d'une machine tournante. En recevant simultanément ces deux informations d'un appareil en lecture, il en déduit que telle « durée » SMPTE sépare deux impulsions de tachymétrie. Le 8330 effectue cette opération d'apprentissage, et sur le G-24S, et sur l'unité maître. Ainsi en vitesse rapide, il est capable de synchroniser précisément les deux machines (en influant sur la vitesse d'embobinage/rembobinage du G-24S).
Cependant, si l'unité maitre est incapable de fournir des informations de direction et de tachymétrie, c'est-à-dire en mode « code only », le 8330 utilisera ses connaissances des limites de varyspeed du G-24S. Lorsque le maître commutera en lecture et enverra du code, l'esclave (qui sait où il se trouve~, ira rechercher le point correspondant. S’il en est très proche, il fera fluctuer sa vitesse de lecture, et dans le cas contraire, basculera en vitesse rapide en se repérant grâce à ses propres informations de tachymétrie jusqu'à rattraper approximativement « l’heure » en question.
L'arrivée aux ports
Nous avons parlé des prises d'entrée/sortie SMPTE, mais les autres ? Le port série (communication), est destiné à des liaisons avec des machines compatibles au standard RS-422, tels que les bancs de montage vidéo (des mises à jour logicielles du 8330 permettront d’étendre cette compatibilité).
Fonctionnellement, le port série cumule les informations SMPTE (et pourra donc se substituer à l'entrée code du 8330), les commandes de transport, ainsi que les informations de tachymétrie et de direction. Le port parallèle 20 broches (transport control), véhicule sous forme logique, les fonctions de transport au standard Fostex, à raison d'une par broche (par le biais d'interfaces, le port parallèle pourra prendre en compte d'autres standards).
On l'associera à la prise d'entrée code, pour asservir le G-24S à une autre machine tournante. En l'absence de 8330 (pour ceux qui posséderaient déjà un synchroniseur), on utilisera le port « accessory 1 » réplique du port parallèle. Le port « accessory 2 » est réservé à de futures applications.
Le 24 pistes sur bande 1 pouce semble en phase de devenir un nouveau standard de l'enregistrement analogique. Pour vous en convaincre, faites le parallèle avec les premiers 8 pistes sur 1/4 de pouce. Décriés par la critique, ils n'ont pourtant pas mis longtemps à s'imposer. Avec ou sans 8330, empressez-vous d'écouter le G-24S.
FICHE TECHNIQUE
Largeur de bande : 1 pouce
Diamètre maxi : 10,5 pouces
Format : 24 pistes
Vitesse de défilement : 38 cm/s ± 0.2%
Varyspeed : ± 12 %
Nombre de moteurs : 4
Nombre de têtes : 2
Entrée : -10 dBV, 30 kOhms, asymétrique
Sortie : - 10 dBV, 10 kOhms, asymétrique
Pleurage et scintillement : CCIR ±0.05% pondéré
Temps de démarrage : moins de 0.5 s
Défilement en vitesse rapide : 140 s pour 740 m de bande
Bande passante : 40 Hz - 18 kHz ±3 dB
Rapport signal/bruit : 84 dB pondéré
THD : inférieure à 1 % à 1 kHz
Diaphonie : supérieur à 55 dB à 1 kHz
Effacement : supérieur à 70 dB à 1 kHz
Encombrement : 430 x 488 x 235 (rackable)
Poids : 35 kg
Test réalisé par Christian Braut en janvier 1991 (Keyboards Magazine n°40)