Dernier produit de la firme Kawai, bien connue des « synthésistes » pour sa série K et notamment pour l'incontournable K5, l'un des seuls « additifs » du marché, le FS2000, dans un tout autre esprit, vient grossir les rangs des arrangeurs.
Indubitablement, à en croire le nombre de constructeurs qui se penchent sur le sujet, l'arrangeur est une valeur en hausse. Sans doute n'ignorez-vous pas que cet instrument, héritier direct des orgues électroniques d'antan (par ailleurs précurseurs des boîtes à rythmes), permet au musicien de piloter un accompagnement automatique dont l'harmonie suit en temps réel les accords plaqués au clavier…
Un package complet
Le FS2000, équipé d'un drive 2SDD, possède un clavier de soixante-et-une touches sensibles à la vélocité (deux courbes de réponse). Sur les côtés, d'avant-gardistes ailettes dissimulent deux haut-parleurs de douze centimètres de diamètre. La sortie stéréo, pour connexion à un système d'amplification externe, est au format cinch. C'est ce même format qu'utilise l'entrée, stéréo elle aussi, à laquelle on raccordera éventuellement d'autres instruments, une platine K7 ou un lecteur de CD. L'appareil est accompagné d'un combiné casque/micro, idéal pour pousser la chansonnette à une heure avancée de la nuit sans exaspérer son entourage. Cinq disquettes de standards sont fournies à cet effet (latins, pops, greatest hits, classics et rocks), incluant accompagnement et mélodie.
Sur un autre plan, les accessoires ne font pas défaut : du porte-partition ou de la housse de protection jusqu'aux câbles d'adaptation (mini jack mâle mono vers jack femelle 6.35 mono, 2 x cinch mâle vers mini jack mâle stéréo, 2 x cinch mâle vers 2 x jacks femelles 6.35 mono), rien n'y manque. Cinq faders sont respectivement dédiés au volume général, à celui de l'entrée stéréo, de l'entrée micro (position dynamique ou condensateur), au taux de réverb général, gate ou hall (englobant sans discernement tous les sons produits par le FS2000), ainsi qu’à celui de l’entrée micro.
Cinq sur cinq
Les voies de multitimbralité sont au nombre de cinq, la balance s'effectuant à l'aide d'une mini table de mixage, visualisation graphique des niveaux à l'appui. Trois de ces voies sont réservées à l'accompagnement automatique (batterie / percussions, basse et accords), tandis que les deux autres, sound 1 et 2, directement accessibles à partir du clavier, s'activent indépendamment (l'une ou l'autre), ou simultanément, en les superposant tout en les désaccordant légèrement si nécessaire, en vue d'épaissir le son. Ces deux voies puisent parmi les cent « tones » en mémoire, dont dix sont « splittés » (C1-F#12, G2-C6).
Soulignons le fait que la sélection des dix premiers tones ne nécessite pas de saisir les zéros superflus. Ainsi, en tapant le chiffre cinq, lorsqu'aucun autre chiffre n'est rentré dans la seconde qui suit, le FS2000 se place automatiquement sur le cinquième tone. L'un de ces tones correspond au drum kit, constitué de soixante-et-un sons de batterie et de percussions (un par touche, plus quatre pads auxquels on affectera les sons de son choix). Les cinq dernières touches sont réservées aux roulements (toms, congas, timpanis, caisse claire), dont la vitesse est proportionnelle au tempo.
Touche à tout faire
Un tone est composé d’une ou deux formes d’ondes, sachant que la mémoire en renferme deux cents : échantillons et multi-échantillons d’instruments acoustiques, wave-forms synthétiques sur un seul
cycle, percussions, effets spéciaux, transitoires… Cinq de ces cent tones sont programmables à l'aide des paramètres suivants pour chacune des deux formes d'ondes : hauteur variable ou fixe (la même note, à définir, sur l'ensemble du clavier), transposition fine (detune), grossière (par demi-tons), profondeur du vibrato, vitesse, volume et ADSR. Pour sélectionner ces paramètres, plutôt que de s'égarer à l'intérieur de labyrinthes de menus et autres sous-menus, il convient de presser une touche du clavier (B4 pour la vitesse du vibrato, C#4 pour le volume…). Bien entendu, les noms des paramètres sont inscrits en clair en regard de chaque touche. En face avant, deux switches agissent sur les sons des parties sound 1 et 2 : chorus et sustain (pour prolongation du release).
Accompagnement
Cent styles d'accompagnement (funk, rock, swing, house…) sont à votre disposition. Chacun d'eux comporte quatre patterns : intro, basic (et ses variations), fill-in (break) et ending. Pour piloter harmoniquement les parties basse et accord de l'arrangement, il existe quatre modes : auto 1, 2, 3 et 4. En mode auto 1, les accords joués à la main gauche entre C1 et F#2 (point de split non programmable), sont analysés, tandis que leur nom s'affiche sur l'écran LCD.
Quinze types d'accords sont reconnus (M, m, 7, 7M, m7, m7M, sus4, 5+, 6, m6, m7-5, 9, m9, 13, diminué), de même que leurs renversements lorsqu'ils ne prêtent pas à ambiguïté (impossible par exemple, de différencier le troisième renversement de C6 d'un Am7 non renversé). Rien n'oblige cependant à jouer toutes les notes d'un accord : la fondamentale suffit à définir un accord majeur, la fondamentale plus la tierce mineure un accord mineur, la fondamentale plus la septième un accord de septième, et ainsi de suite. Dommage que la main gauche ne puisse aller au-delà de F#2 (tessiture d'une octave et demie), ce qui nous prive de certains accords (Am7, F9…), sauf à les « renverser »· Précisons qu'aucun son n’est émis dans la zone à gauche du point de split, uniquement destiné à piloter l’accompagnement.
Chacun sa grille
En mode auto 2, la main gauche (la note la plus grave en cas d'interprétation polyphonique), pilote la partie basse de l'accompagnement. Contrairement au mode précédent, les sons sound 1 et/ou 2 sont émis. Quant à la main droite, elle pilote la partie accord dès l'instant où trois notes minimum sont enfoncées simultanément (en comptant celle de la main gauche), et à condition qu'elles correspondent à l'un des quinze types d'accords reconnus. Pratique pour jouer en solo et changer d'harmonie en plaquant un accord de temps à autre.
En mode auto 3 (le clavier demeure muet), tous les accords sont pris en considération, et non plus seulement les quinze cités précédemment. Particulièrement approprié aux débutants, le mode 4 propose une grille d'accords préprogrammée par style, dont on déterminera la tonalité et le mode (majeur ou mineur). Chacun de ces accords est affecté à l'une des touches situées à gauche du point de split. Ainsi, pour une grille de quatre accords, on appuiera successivement sur les notes C1, C#1, D1 et D#1, à moins de presser la touche « one finger ad lib » pour la faire boucler automatiquement. La diversité des modes offre une souplesse de contrôle de l'arrangement qui satisfera tout autant le novice que le musicien confirmé.
Variations
Plusieurs procédés viennent enrichir l'arrangement. En mode auto 1, la commande « duet » double intelligemment les notes jouées à la main droite en fonction de l'harmonie (contre-chant). L’ « expander dial » (commande rotative située au-dessus des molettes de pitch bend et de modulation), permet de passer en temps réel d'une variation à l'autre du motif de base (quatre au total). Certaines de ces variations adjoignent à la partie accord un second instrument.
En infligeant à l’ « expander dial » une rotation rapide, un motif de fill-in précède le changement de variation. Dernier procédé d'enrichissement et non des moindres, le « one finger ad lib » en mode auto 1 exclusivement. Les touches G2 à C3 (ce qui explique que le point de split soit fixe) déclenchent l'une des dix-sept « phrases » que contient chaque style d'accompagnement. Ces phrases, assimilables à des motifs solo d'une mesure, suivent évidemment l'harmonie de l'arrangement. Trois des cent styles illustrent l'utilisation de la progression d'accords automatique en conjonction avec une mélodie divisée en dix- sept mesures « one finger ad lib », notamment avec le Boléro de Ravel.
Faites-le vous-même
Le FS2000 autorise la programmation en temps réel des quatre patterns (intro et fill-in d'une mesure, ending de deux mesures, basic de quatre mesures, y compris les variations de l’expander), et des dix-sept motifs d'un style, pour un maximum de cinq styles. Tout comme pour l'édition des sons, certaines fonctions font appel aux touches du clavier (sélection ou suppression d'un motif de basse…), en l'occurrence F#5 à C6.
Parallèlement à cela, toujours en temps réel, un séquenceur d'une capacité de trois songs enregistre l'ensemble d'une performance (l'accompagnement et ses variations, le jeu en direct des parties sound 1 et 2, les changements de style, de son, de volume, etc). Une fonction overdub permet d'enregistrer cinq parties les unes à la suite des autres. Appelés registrations, vingt emplacements mémorisent l'ensemble des réglages (sound 1 et 2, style d'accompagnement, tempo, volumes…). Enfin, le lecteur de disquette sauvegarde sons, styles, registrations et songs.
Implémentation
Le FS200, de par une bonne implémentation, s'intègre aisément dans un environnement MIDI. Il accepte de piloter d'autres instruments ou d'être piloté (section d'accompagnement comprise). Citons la transmission et la réception de la modulation, du sustain, du chorus, des program changes, le mode local, la synchronisation, les messages exclusifs de dump, etc. Il est même prévu d'enregistrer en MIDI des patterns ou des motifs « One finger ad lib » reçus d'un séquenceur externe, maître de la synchronisation.
Nous terminerons la description de cet arrangeur par l'énumération des quatre pédales : sustain, acc.hold (émission de la grosse caisse, du charley et de l'accord courant à chaque pression) , expander (en lieu et place du « dial ») et fill-in. Voilà, vous savez tout ou presque, sur cet instrument plein d'idées dont le prix généralement constaté au 1/3/92 est de 1 822 € TTC.
Test réalisé par Christian Braut en mars 1992 (Keyboards Magazine n°53)