Il semblerait que les développeurs de logiciels sur Atari boudent carrément l'édition de partition. Certes, il faut aimer relever les challenges graphiques. Musilog, célèbre pour ses Track 24, Studio 24 et Big-Band, n'a pas hésité à plonger ! Après quelques mois d'immersion, il refait surface avec Proscore version 1.1.
Côté caractéristiques, c'est l'euphorie. Jusqu'à 54 portées, notation pour batterie, enregistrement temps réel ou pas à pas, écoute du morceau via MIDI, importation de MIDifiles, etc. Le tout requérant au minimum un méga de mémoire plus un moniteur monochrome, cela va sans dire. Bref, la panoplie du parfait petit copiste.
Le fin du fin, pour un éditeur de partitions, c'est d'implémenter un maximum de fonctions d'édition pointues à l'égard du professionnel, sans pour autant négliger la simplicité d'utilisation indispensable à l'amateur. Après les préliminaires d'usage, nous verrons comment Proscore se tire de ce compromis.
Les matériaux bruts
Proscore, en plus de son propre format de fichier (morceau ou piste individuelle), charge (type 0 ou 1) et sauvegarde (type 1) en MIDifiles. Les méta-évènements de signatures et de noms de pistes sont interprétés. Pour les étourdis, le menu fichier permet aussi de formater les disquettes. La compatibilité avec le reste de la gamme Musilog est préservée par un programme annexe (non protégé par la clé), qui convertit le format Studio 24 en MIDifiles, et réciproquement Les petits malins s'en serviront accessoirement pour basculer leurs fichiers entre les types 0 et 1.
Les 32 pistes disponibles dans Proscore sont réparties en 27 pistes polyphoniques (splitables en deux portées), quatre pistes de batterie/percussion disposant de trois types de symboles (avec pour chacune une table de réassignation note MIDI/note affichée, plus une gestion séparée par instrument), et une piste harmonique intelligente d'accords, à condition de jouer en place des notes simultanées. À la lecture, ce ne sont pas vos accords, mais ceux programmés dans Proscore, qui sont rejoués.
La résolution à l'enregistrement est au 48e de noire, et l'affichage tolère jusqu'à la quintuple croche. Le maximum de mesures est de 2 000, et son dépassement dans le locator droit attire parfois deux séduisantes bombes. à part ça, si le séquenceur dédié n'est pas votre tasse de thé, passez au paragraphe suivant.
Deux en un
Avec ses 32 pistes, ses touches rec, play, stop, Proscore, en bon séquenceur, se fera un plaisir de vous enregistrer lui-même. Les fonctionnalités MIDI sont en nombre restreint. Soft-THRU de rigueur (avec re-canalisation), métronome MIDI (choix de la note et du canal), envoi optionnel en début de piste d'un numéro de changement de programme, ainsi que d'une valeur prédéfinie pour deux contrôleurs de votre choix, et enfin, expansion/compression de la vélocité sur une plage de 0 à 250 % (pas d'effet à 100 %).
La signature accepte toutes valeurs de 1 à 32 en numérateur, et les puissances de deux, de 0 à 4, en dénominateur. Le réglage de tempo s'effectue aussi bien par le biais d'un potentiomètre, que par saisie directe. En cliquant dessus, le métronome s'active afin d'en faciliter le réglage. Demandez-lui gentiment de battre les temps, noires, croches ou doubles croches. Deux fonctions que l'on aimerait rencontrer plus souvent. Enfin, le punch-IN/OUT se pratique après paramétrage des deux locators.
Tout cela est plus que nécessaire, et amplement suffisant, pour enregistrer le futur chef-d'œuvre à immortaliser sur papier. Ils ont aussi pensé aux manipulations de fragments de piste, ou blocs (couper, copier, coller, transposer, insérer), et de pistes elles- mêmes (copier, superposer, supprimer). Regrettons l'absence d'une quantification en enregistrement, qui faciliterait bien l'édition (évitant, pour qui ne joue pas en place, d'afficher les seizièmes de soupir et autres âneries). Mais n'espérez tout de même pas trouver la collection complète des fonctions d'un séquenceur, car c'est avant tout un outil d'impression...
Demandez l'édition spéciale
L'option « paramètres » prépare la mise en page du score. Piste à visualiser (oui/non), nom de cette piste (oui/non), tonalité, choix du mode majeur ou mineur pour l'interprétation et affichage d'altérations (par exemple Lab en Do Majeur et Sol# en La mineur), choix de la clé (les sept existantes plus deux transposées en Sol, (+/- une octave), nombre de portées (1/2), transposition (+/- 12), noms des accords (sur une seule piste), paroles (oui/non), et portée vierge (oui/non).
En mode d'édition, l'écran principal se métamorphose en une superbe partition orchestrale, sous laquelle s'affichent six types de commandes (sauf en mode plein écran). En lecture, un seul instrument est affiché sur deux systèmes (une ou deux portées selon le cas). Pendant que le premier joue, l'autre se rafraichit, pour vous permettre de visualiser sans cesse la portion de partition courante.
Des cases de défilement. deux ascenseurs (le vertical ne fonctionne qu'avec les flèches), mais surtout un goto paramétrable, provoquent l'accès quasi-instantané à n'importe quelle mesure. L'espacement des portées, barres de mesure communes, systèmes, et autres accolades s'effectuent d'un clic de souris.
Mais si vous désirez rentrer les notes pas à pas, l'écran n'est à ce stade qu'un rectangle blanc. Il faut ici utiliser l'édition de notes. A l'aide de la souris, du clavier de l’Atari, et éventuellement du clavier MIDI, vous choisissez la position, la hauteur et le motif rythmique. Début et fin d'accords s'obtiennent en pressant F9/F1O. Même principe en édition où les notes s'insèrent, se suppriment, et se modifient (durée, position, hauteur). Dommage que l’on ne puisse encadrer un bloc de notes à la souris, et qu'il soit impossible d'intervertir deux portées sans manipuler les pistes. Mais Proscore possède encore cinq tours dans son sac : les cinq autres cases d’édition.
Un score honorable
La case « fonctions » quantifie à loisir début et fin de note, en binaire, ou binaire et ternaire. Elle peut aussi supprimer celles qui sont très courtes, ou transformer le staccato en legato. A vous de décider également de l'affichage du recouvrement de notes, et de choisir entre barres communes ou notes isolées. Par chance, les modifications sont bufferisées, et s'annulent d'une simple pression sur un undo.
La représentation musicale joue avec les queues de notes. En effet, sur une même portée physique peuvent coexister deux voix logiques avec chacune leurs propres orientations de tiges, et leurs propres silences. C'est aussi à l'utilisateur de décider de l'existence de barres communes à un ensemble de notes, de l'affichage des syncopes, et du regroupement des mesures de silence.
Les signes d'expressions regorgent de coda, crescendo, pédale et tout ce que l'on peut imaginer. C'est ici que l'on entre le texte et les paroles, qui viennent comme par magie s'aimanter aux notes de la mélodie, par tabulations successives.
Les deux dernières cases gèrent les changements de clé et de tonalité (pour la signature, voir dans les menus déroulants), ainsi que l'édition des accords (éventuellement reconnus en piste 32).
Dernière étape avant bon à tirer, la page d'impression. Les options sont nombreuses (choix des pistes, des mesures de début et de fin...), et les drivers aussi. Compatibilité 9 et 24 aiguilles, jet d'encre et laser, et possibilité de faire sa propre cuisine. Mais au fait, puisqu'on est dans la mise en page, pourquoi les choix d'en-tête et de fin de morceaux s'obstinent-ils à rester en grisé ?
Dans l'ensemble, Proscore explore très à fond, pour un prix honnête, 260 € (prix public généralement constaté au 1/12/89) tous les détails contribuant à la finesse d'une partition. De l'élaboration professionnelle de scores complexes, à la simple impression de quelque portées. Les engagements, nombreux pour un numéro 1.1., sont tenus. Mais pour une équipe qui travaille dans l'impression, un manuel utilisateur un tantinet plus consistant ne serait pas du luxe !
Test réalisé par Christian Braut en décembre 1989 (Keyboards Magazine n°28)